A voir samedi 19 août 2017 à 5h sur Arte |
En août 1970, 600’000 fans se ruèrent sur l’Ile de Wight pour assister au troisième et dernier festival (première mouture) à s’y dérouler. En dépit d’une organisation approximative, d’une agressivité sous-jacente due en bonne partie à la gestion confuse de l’accès au festival et à une communication maladroite, de musiciens pris en otage par les organisateurs qui, dans l’espoir de limiter la casse côté resquille, affirmèrent que ceux-ci ne joueraient que s’ils étaient payés cash immédiatement, Lerner a réussi à capter de grands moments de musique notamment les Who incendiant rageusement «Young Man Blues» introduit par Peter Townsend: «un blues pour ceux qui ont payé leur ticket…», les versions lugubres de «When the Music’s over» et «The End» des Doors, Jimi Hendrix délivrant une interprétation venue d’ailleurs de «Voodoo Chile», ou encore Leonard Cohen chantant «Suzanne» devant un public extatique.
«Message to Love» est un documentaire inestimable qui constate la faillite des «sixties» et dont la sortie fort tardive (près de 30 ans après les faits) reste surprenante. C’est aussi une démonstration irréfutable des limites d’une utopie libertaire dans une société régie par des rapports d’argent auxquels même les artistes ne sauraient échapper. «Pas d’argent, pas de festival» comme le lance Rikki, maître de cérémonie tour à tour angélique et paternaliste… Ce classique instantané est à ranger aux côtés de «Woodstock», «Monterey Pop», ou mieux encore de «Gimme Shelter» en tant que constat de la fin du rêve hippie, rattrapé par l’industrie musicale, la violence et les drogues dures auxquelles, deux semaines après sa dernière prestation sur l’Ile de Wight, Jimi Hendrix allait succomber, hélas suivi peu après par beaucoup d’autres : Jim Morrison (dont ce fut également un des ultimes concerts), Janis Joplin, Tim Buckley, pour ne citer que le haut de la liste.
de Murray Lerner
Etats-Unis, 1996, 2h08