A voir jeudi 8 décembre 2011 à 20h40 sur Arte
D’origine grisonne, Marc Forster a rallié les USA en 1990 et a passé onze ans à remuer ciel et terre pour concrétiser son premier long-métrage. Sous la houlette d’un producteur noir, avec le soutien d’acteurs reconnus (Billy Bob Thornton, Halle Berry, Peter Boyle), il a réussi l’exploit de dresser de l’Amérique profonde un portrait en demi-teinte, le seul possible, qui restitue les mouvements mystérieux de l’âme. Dans le même temps, et c’est là que réside le tour de force, Forster arrive à dresser un réquisitoire implacable contre la peine de mort, parachever une démonstration de l’absurdité du racisme et faire un éloge de l’amour débarrassé de tous ses oripeaux judéo-chrétiens. Cette réussite tient bien évidemment à la qualité du scénario. Rappelant le meilleur Kieslowski (celui du «Décalogue»), Forster met en parallèle des destins individuels dont la réunion, de prime abord, très improbable oblige le spectateur à réviser ses jugements, ses préjugés…
Une petite ville de l’état de Georgie, de nos jours. Dans la famille Grotowski, on administre la peine de mort de père en fils. Handicapé, le grand-père (Peter Boyle) éructe à longueur de journée son racisme et sa misogynie. Bourreaux commis au «Departement of Corrections» père ((B. B. Thornton) et fils (Heath Ledger) perpétuent la tradition familiale. Les femmes ont déserté depuis longtemps cet univers terrifiant, par suicide ou abandon du foyer conjugal, c’est selon. Un jour, le fils craque en conduisant dans le couloir de la mort un condamné noir qui, pour tromper l’angoisse des derniers instants, a dessiné (avec talent) son portrait… Pour son interprétation, H. Berry a reçu l’Oscar de la meilleure actrice en 2002, une distinction décernée pour la première fois à une femme de couleur! Reconnu, Forster poursuit depuis lors une carrière inégale, tissé de films plutôt réussis dans leur étrangeté («Neverland») ou simplement honorables («Les Cerfs-volants de Kaboul»), quand il ne s’agit pas de commande («Quantum of Solace»)
Monster’s Ball
de Marc Forster
Etats-Unis, 2001, 1h55